Ne pas plier, ne pas rompre

Je reviens à l'instant du poste de police où j'ai passé deux heures et demie encore aujourd'hui. Je suis très contente : je viens de rencontrer un officier que je ne connaissais pas encore (ce qui est surprenant compte-tenu du nombre de fois où je m'y suis rendue pour faire une déclaration).

Petit résumé de la situation :

Samedi premier octobre, en revenant de Beaubourg où j'avais passé un après-midi studieux, je me fais voler mon sac à main. Je n'ai rien vu, rien senti. Instant de panique. Je fais opposition à ma carte des carte de crédit et rentre au plus vite chez moi puisque mes voleurs ont mes clefs et mon adresse. Fort heureusement, la propriétaire de mon studio est chez elle et a un double des clefs : je rentre chez moi. Dans un regain d'espoir, j'appelle sur mon portable qui était resté allumé dans mon sac. Une jeune fille décroche et dit avoir trouvé mon sac à main sur un quai de métro et l'avoir conservé pour me le rendre. Elle veut me fixer un rendez-vous mais je ne peux m'y rendre assez vite, elle me donne donc un numéro de portable pour la joindre le lendemain et me fixer un nouveau rendez-vous.

Dimanche matin, j'appelle ce numéro, pleine d'espoir. Il n'est pas attribué. Je me rends donc au poste de police de Sèvres pour faire ma première déclaration de vol. Je n'ai plus rien : mes papiers se sont envolés, mes clefs, mon argent, mon portable et surtout, mes notes de lectures personnelles, ce qui est particulièrement handicapant en khâgne !!! Je n'ai plus qu'à attendre, je suis complètement découragée. Heureusement, une certaine rage commence à pointer son nez dans mon esprit : je veux bloquer mon portable. Au moins, si je ne peux l'utiliser, personne ne le fera à ma place ! Je m'aperçois alors que je peux consulter le détail des communications qui ont été passées depuis mon téléphone. J'appelle les deux numéros qui reviennent le plus fréquemment. Une personne décroche, je lui explique mon histoire. Elle m'annonce alors que sa fille l'a effectivement appelé la veille avec un portable dont elle, la mère, ne connaissait pas le numéro. Sa fille, Mademoiselle D, est en fugue depuis une semaine avec Mademoiselle R. Toutes deux sont recherchées par la brigade des mineurs pour avoir commis plusieurs vols. La seconde personne que j'appelle me dit être une connaissance de Mademoiselle D. Elle me réexplique ce que je sais déjà et ajoute que les deux filles sont actuellement dans un hôtel à Pigalle. Je suis heureuse : je ne pensais pas tirer satisfaction d'une quelconque vengeance et pourtant, c'est bien ce à quoi je pense. Je retourne donc faire une déclaration au poste de police. L'officier qui me reçoit est effaré par les informations que j'ai réussi à obtenir. Dès lors, je dois revenir à chaque avancée de l'enquête faire une nouvelle déposition. Je me crois dans un épisode de mauvais téléfilm policier : c'est assez grisant.

Comme je n'ai plus d'argent, on m'en envoit par mandat. Malheureusement, pour récupérer le mandat, il me faut impérativement une pièce d'identité or ma carte d'identité comme ma carte d'étudiante sont parties avec mon sac. Je fais le siège de la poste pendant plusieurs heures en donnant tous les papiers possibles et imaginables sur lesquelles il y a mon nom et qui sont encore en ma possession. Cela ne suffit pas. Je me souviens alors que j'avais eu l'intuition de scanner ma carte d'identité et ma carte d'étudiante et de sauvegarder le tout. Je retourne chez moi imprimer tout cela et le ramène à la poste. La guichetière me remet l'argent en me précisant qu'elle prend un risque puisque ce qu'elle vient de faire n'est théoriquement pas légal. Je commence à être rassurée. Soit dit en passant, ce sont aussi ces photocopies qui m'ont permis de m'inscrire en fac cette année !

Je retourne chez moi et attends de pied ferme le serrurier que ma propriétaire devait appeler. Il ne vient pas. J'innonde le portable de la propriétaire de mon appart de messages. Elle ne me rappelle pas. Autrement dit, mon appartement peut être dévalisé dès que je n'y suis plus ! Je n'ai aucun moyen pour payer le serrurier puisque la somme que j'ai reçu à la poste est insuffisante pour cela et que la dite-poste refuse de renouveler son exploit frauduleux. Les serruriers que je contacte ne veulent pas non plus envoyer la facture à ma mère. Je suis dans une impasse.

Quelques jours plus tard, je consulte mes comptes sur internet et, ô surprise, mon solde a curieusement baissé. Je regarde le détail et m'aperçois alors que les chèques qui, normalement, avaient été bloqués par ma banque, ont été débités. Scandale. J'appelle ma banque. Ma conseillère me répond la bouche en coeur que tant que je n'ai pas signé quelques papiers administratifs, l'opposition ne peut-être réellement effective. Elle me précise qu'elle m'a envoyé tout ce que je devais signer en recommandé. Direction ma boîte aux lettres : j'ai effectivement un avis de passage dans ma boîte. Je file à la poste et recommence à négocier trois heures durant pour prouver mon identité. Trois heures plus tard, j'ai la lettre en main !

Il me faut alors retourner au poste de police pour déclarer l'encaissement de mes chèques. L'agent de policer qui est au guichet me dit qu'à l'heure à laquelle j'arrive, je vais attendre longtemps avant de faire ma déposition, que de toute façon, quelqu'un est déjà en train de déposer plainte mais que je dois m'estimer heureuse parce qu'il y a toujours en moyenne une dizaine de personnes qui attendent pour porter plainte et qu'aujourd'hui, il n'y a personne. Je m'étonne de n'avoir jamais vu ne serait-ce que l'ombre des dix personnes à chacune de mes visites et lui explique que compte-tenu de mon emploi du temps de "khâgneuse", je ne peux venir faire déposition hors des plages horaires de ses séries télévisées. Je commence à en avoir franchement marre. Il est temps de taper du point sur la table !

Ma déclaration faite, je vais faire faxer tous ces document à ma banque pour l'opposition. Je continue à avoir une chance extraordinaire : le fax de la poste de Sèvres est en panne !!! J'envoie donc un recommandé mais le délai sera plus long. En rentrant chez moi, j'appelle la mère de Mademoiselle D qui me dit que sa fille a été retrouvée avec quatre portables en sa possession. A cet instant, la communication est coupée et lorsque je veux la rappeler, je n'ai que sa messagerie. Je me rends donc de nouveau au poste de police pour refaire une déclaration et voir si je ne peux pas en savoir plus. L'officier que je rencontre relit mes déclarations précédentes et s'arrête en fronçant les sourcils sur la dernière : il n'en comprend pas un traitre mot. Il me la lit. En effet, cette dernière est écrite dans un français plus qu'approximatif ... Il faut donc la refaire totalement ! Je cherche ensuite à avoir des informations concernantmes voleuses. Il me dit ne rien savoir, qu'il faut, pour cela, que je m'adresse à un bureau au second étage mais qu'avant trois heures, il n'y a personne et qurtout que je risque d'y perdre beaucoup de temps avant de trouver la personne qui traite mon dossier. Je lui demande pourquoi et il m'explique que les dossiers sont posés en vrac sur des tables ... Je téléphonerai plus tard.

    Voilà où en est l'enquête pour l'instant ! J'espère que tout cela va finir vite (quoiqu'il me faille encore trois mois avant d'avoir ma nouvelle carte d'identité et que la mairie de Poitiers à laquelle j'avais écrit pour obtenir un extrait de naissance m'a renvoyé mon courrier en l'accompagnant d'un nouveau dossier administratif à remplir pour obtenir l'extrait en question ...).

    Je n'ajouterai à cette histoire ni mes déboires administratifs avec Paris III pour mon inscription et mon équivalence en lettres modernes, ni mes problèmes scolaires (mon temps a été très mal employé ces derniers temps entre baisses de morales et sitting au poste de police), ni mes diverses difficultés personnelles.

    Dans ces cas-là, il n'y a qu'une chose à faire : foncer, tout affronter, garder le port de tête altier, ne pas plier, ne pas rompre ! Traverser la tempête en belle pirate urbaine ! A propos de piraterie, la perte de mon sac, qui représentait ma maison ambulante, me conforte dans le sentiment de non-attache. Je n'ai pas de port auquel rendre de comptes. Les corsaires, très peu pour moi !

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